Il est presque sept heures du matin. La voiture se gare devant la maison. Je prends mon sac et m’engouffre à l’arrière. Ils sont tous là. Laurent notre chauffeur, bien sûr, Anthony, Eric et Martine, notre Présidente. Direction VANNES. Près de trois heures de route. Nous scrutons le ciel, menaçant mais sec.
Après NANTES, tout à coup, des giboulées incessantes s’abattent sur la route. Bienvenue en Bretagne. Après une heure de déluge, à l’approche de VANNES, le ciel s’éclaircit, la pluie cesse.
Il est 10 heures. Nous allons chercher nos dossards et flânons dans le village départ. Vers 11 heures, nous cherchons un coin tranquille dans les alentours, avec un banc, pour un casse croûte frugal.
Un chien avec l’air malheureux tient en laisse sa maîtresse, une petite femme sans âge, complètement accroupie, les yeux exorbités et hagards. Bonjour ! Pas de réponse. La nuit a dû être dure. Puis nous croisons une bonne sœur, sur son vélo, qui marmonne des jurons incompréhensibles. Il y a des gens bizarres à VANNES.
Nous prenons la direction des navettes pour Auray. Après 20 minutes de car, nous voilà proche de la zone départ. Martine ne voulait pas que l’on soit en retard pour ne pas stresser. Pas de danger, le départ n’est que dans 2 heures et demie. L’attente est longue. J’en profite pour boire mon litre d’eau mélangée avec du jus de raisin. Nous retrouvons Nadia, une collègue de Martine, qui a de la famille à Vannes et qui, comme nous, participe pour la première fois à ce semi-marathon AURAY-VANNES. Nous patientons et nous échauffons ensemble.
Quand nous entrons dans le sas départ, des milliers de coureurs sont déjà là. Nous nous souhaitons bonne course puis essayons de remonter la file. Nous stoppons loin de l’arche départ, une cinquantaine de mètres derrière la flamme du meneur d’allure des 1h50.
C’est parti ! Nous voyons, de loin la foule des premiers coureurs qui entament la côte du départ. Nous franchissons la ligne de départ environ 2 minutes après les premiers.
Pour remonter le peloton, il nous faut zigzaguer, prendre trottoirs et bermes, accélérer et ralentir fréquemment. Nous passons le 1er kilo en 4mn 45. Nous dépassons maintenant le meneur d’allure d’1h50. Nous accélérons. Au 3e kilo, nous avons 25 secondes d’avance sur notre timing.
Arrive le pont de Bono. J’ai une sensation bizarre. Le pont bouge. Cela est dû aux centaines de coureurs qui courent dessus. On a l’impression de courir sur un mini trampoline.
Premier ravitaillement, je prends une bouteille d’eau à la volée, la partage avec Laurent pour gagner quelques secondes. Nous continuons sur un rythme de 4hmn20 à 4mn 25 au kilo.
Nous approchons de Baden (7e kilo). Il parait qu’il y a dans ce village une côte terrible. En effet, dans une petite rue étroite, sur 4 à 500 mètres, la montée est raide. Je raccourcis ma foulée. D’autres coureurs accélèrent, montent en force. A’ mi-pente, je sens un début de crampes sur tous les muscles de mes jambes, ce n’est pas normal. Manque de sucres, manque de protéines, je ne sais pas. Pas manque d’entrainement pourtant. Je ralentis encore. La côte est finie, je temporise, prend un gel sucré. Les douleurs disparaissent. Deuxième ravitaillement, c’est Laurent qui va chercher la bouteille. Ca m’arrange.
Laurent relance et maintient une allure rapide, environ 4mn 20 au kilomètre. J’ai du mal à le suivre, lui dit de ne pas m’attendre. Je reste finalement derrière lui. Faux-plat descendant, ça va mieux. Nous apercevons, loin devant, à au moins 400 mètres, la flamme du meneur d’allure des 1h 40mn. Nous nous rapprochons doucement mais sûrement. 3 kilomètres plus loin, au 11e, il nous reste une centaine de mètres de retard. Débute une longue côte. Je temporise, craignant le retour des sensations de crampes. Finalement, ça va. 3e ravito, je prends un gel, attrape une bouteille, boit, partage avec Laurent.
Km 12, c’est repartit. Sans être super, les sensations sont meilleures, je prends le relais de Laurent. J’essaie de revenir, sans trop forcer sur le meneur d’allure. 100m, 80m, 50m, l’écart se réduit. Laurent est toujours derrière moi. La route s’élève un peu, je n’ai plus qu’une idée en tête : revenir sur la flamme des 1h 40mn avec le calcul suivant : étant parti avec environ 2mn de retard sur lui, si j’arrive avec lui sur la ligne d’arrivée, j’aurais atteint mon objectif d’1h38mn. Mon regard reste rivé sur la flamme, plus rien d’autre ne compte. 40m, 30m, 20m, 10m. Il va vite ce meneur d’allure, il devrait être en 4mn 44 au kilo, mon GPS annonce 4mn 35. C’est dur.
Ca y est, j’y suis, juste en haut de la côte, vers le 15e kilo. Je temporise derrière le petit groupe. J’essaie de me retourner. Mince, Laurent n’est plus là. Je reste avec le groupe d’une trentaine de coureurs. J’attends un kilomètre. Début d’une longue descente, je dépasse le groupe des 1h 40, prends 50 mètres d’avance. C’est super, la descente.
Puis au loin, devant, je vois le long cordon de coureurs qui remonte une côte qui a l’air raide. Ce doit être la fameuse côte du Vincin. Les spectateurs ne se sont pas trompés, ils sont nombreux à cet endroit. En effet, c’est raide, j’ai mal aux jambes, réduit mes foulées, mes muscles sont tétanisés. Le groupe, ou ce qui en reste, du meneur d’allure me dépasse.
Ouf ! La côte est finie. Le meneur est 20m devant moi. Je préfère temporiser. Il reste 2km. J’ai mal. Que faire ? J’hésite. Attendre Laurent ou aller chercher ce «p….. » de meneur d’allure. Je ne peux pas accélérer mais je m’aperçois que je ne peux pas ralentir non plus. Je suis en mode automatique. Mes guiboles ont une cadence et je ne peux pas la changer, même si ça me fait mal. C’est le genre de sensations que j’ai, d’habitude, en fin de marathon. Alors, je reste en chasse-patate. Avec ce maudit meneur d’allure qui me nargue 20 mètres devant, qui a la même allure que moi mais avec ces quelques mètres d’avance. Un faux plat montant dans une cité, j’ai mal. Flamme rouge, pas trop tôt.
J’entends le meneur d’allure qui exhorte son petit groupe. Ah ! Je reviens sur eux. Le meneur d’allure braille, se retourne, nous interpelle, moi et les quelques clampins qui trottent aux alentours. Comment il fait pour avoir cette énergie, moi je suis mort. Je fais la jonction à l’entrée du stade. 300 mètres, la piste est douce. Je déroule jusqu’à l’arrivée. Top.
Mon chrono indique 1h 36mn 48’. (Plus tard, mon classement avec ma puce indiquera un temps réel de 1h37mn 29’. Mystères de la chronométrie.) Mon temps est correct mais je me suis fait mal. Ce semi est une préparation du marathon de Vannes. Je pensais pouvoir préparer ce marathon sur une base de 4mn40 au kilo. Je sais déjà que ce ne sera pas possible, il vaut mieux viser 4mn45 ou 4mn 50. Tant pis.
Laurent arrive peu de temps après moi. Il a géré son semi en préparation de Marseille-Cassis. Le ravito d’arrivée est bienvenu. Nous sortons du sas d’arrivée. Anthony nous attend, frais comme un gardon. Il a déjà rendu sa puce, été chercher son cadeau (un magnifique bol breton. Il faut aimer !) ainsi que le sac d’affaires qu’on avait déposé au départ. Un phénomène, cet Anthony. Un an de course à pied et un premier semi-marathon, plutôt difficile, avec du dénivelé, en 1h 29mn.
Maintenant, la foule des 5000 coureurs se déverse à grand flots. Nous essayons de récupérer Eric et Martine.
Eric termine en 1h52 et Martine en 2h06. Ils sont contents. En fait, on s’aperçoit, à part notre phénomène Anthony qui vient d’une autre planète, nous quatre, Martine, Eric, Laurent et moi avons une expérience qui nous permet de bien gérer ce genre de course difficile car mélange de vitesse, résistance et dénivelé.
Direction, la douche dans de super grands vestiaires (bravo pour l’équipement sportif qu’est ce stade du Kercado). Nous décidons de rester pour la remise des prix. Non ! Non ! On ne pense pas être appelés parmi les lauréats de la course. Il y avait trop de kenyans devant nous. Mais à la fin, il y a une tombola avec une twingo (si, si, une vraie) à gagner. On commence entre nous à se demander qui va la ramener jusqu’à Etival, on se propose aussi de se la partager selon les jours de la semaine.
Mais non, ce n’est pas nous qui gagnons. Pas de chance. Bon, il faut penser au retour maintenant. Martine a faim. Il faut trouver une boulangerie à Vannes. Il est 19h30 un dimanche soir. Nos recherches sont vaines. Tant pis, on attendra une aire d’autoroute.
Le retour se fait tranquillement entrecoupé de deux haltes, une pour ma vessie semi-prostatique, une autre pour le ventre affamé de Martine.
Il est 22h30. Laurent nous ramène chez nous. Merci chauffeur.
Quelle journée.
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